mardi 23 juin 2015

L'historialité de Corbin




Extrait de : DOOKHY Riyad, "Un messianisme historial ? L'historialité dans la pensée de Henry Corbin", Messianisme, souveraineté et sécularisation, Les Cahiers Philosophiques de Strasbourg, Presses Universitaire de Strasbourg, 2015, v. p. 39 et s.





" ... Si la pensée de Corbin fait état des développements heideggériens, elle se démarque bien de ceux-ci et indique ses distances nettes. Situons brièvement le sens de l’historialité chez Heidegger en guise de point de départ, mais également en guise d’une rupture nécessaire au développement ultérieur. L’historialité (« Geschichtlichkeit ») notamment celle du Sein und Zeit[1], répond au problème de la « Ständigkeit des Selbst » (le maintien de soi)[2]. En ce sens, le Dasein[3] se révèle comme essentiellement ou primairement historial (« geschichtlich »). Il est ainsi un « être historique » avant la science de l'histoire (« Historie »)[4]. Or l’histoire est posée comme problème existential. C'est un rapport du Dasein à son propre passé qui s’entend comme à des possibles dans le passé. L’historialité constitue en fait une élaboration plus concrète de la temporellité (« Zeitlichkeit »)[5] ... "



[1] M. Heidegger, Sein und Zeit, pp. XI + 437, cité ici en titre abrégé (« SuZ »). Pour les traductions, voir la bibliographie choisie.
[2] SuZ, p. 375 § 72 ; ÊeT, Vezin, p. 439 § 72.
[3] Il conviendrait d’employer le « dasein » sans la majuscule quand il ne s'agit pas ici d'une pensée strictement heideggérienne. Nous avons préféré faire référence quand le contexte nous le permet de parler d'un « être-au-monde ». L’expression « Dasein heideggérien » comme nous l’aurons indiqué dans le texte ne peut être ici tautologique. De plus, il ne nous apparaît pas nécessaire d’introduire le « Da-sein » aux côtés du « Dasein ».
[4] C'est dans les conférences de Kassel en avril 1925 que Heidegger œuvre pour la distinction entre « Historie » et « Geschichte ». Cf. François Jaran traduit « Geschichte » par ‘histoire’ (de l'ordre d’une histoire « vécue ») et « Historie » par ‘enquête historique’ ou ‘science historique’ (qui est de l'ordre d’une histoire « écrite »). S’il traduit ‘historisch’ par ‘historique’, et ‘geschichtlich’ par ‘historial’, il traduit par contre ‘Geschichtlichkeit’ par ‘historicité’ et non ‘historialité’; v. F. Jaran, « De la différence entre l’histoire comme événement (Geschichte) et l’histoire comme science (Historie) chez Heidegger », Klésis, p. 105, n° 1.
Tant Vezin que Martineau maintiennent le terme d’ « historialité » pour «Geschichtlichkeit». Martineau traduit ‘Historie’ par « enquête historique », alors que Vezin le traduit par « études historiques ». Pour autant, Greisch est d’avis que l’« enquête historique » est trop restrictive pour exprimer « Historie » et que la traduction par « études historiques » par Vezin sera « préférable ». Greisch se permet de penser à « historiographie », mais propose également « science historique » ; J. Greisch, Ontologie et temporalité, Esquisse d'une interprétation intégrale de Sein und Zeit, p. 374.
Cf. Les termes de « historical » et « historicality » en anglais, cf. M. Heidegger, Being and Time, p. 427.
[5] SuZ, p. 382 § 74 ; ÊeT, Vezin, p. 447 § 74.




http://www.vrin.fr/book.php?code=9782868209160




http://www.amazon.fr/Messianisme-souverainet%C3%A9-s%C3%A9cularisation-Collectif/dp/2868209165

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